Il s'est accoutumé.
N'est-ce pas un peu triste pour un homme qui traîne derrière lui le cadavre de son père, de dire qu'il n'en sent plus l'odeur? Cette révélation a quelque chose de dérangeante tant elle est dite avec détachement. Bien qu'Isaac se donne du mal pour offrir à son défunt géniteur, des funérailles honorables, il y a quelque chose d'étrange dans son attitude. Où est la tristesse? Le chagrin semble avoir déserté son faciès qui tient plus de ce peuple sauvage que de celui-ci privilégier que sont les hommes blancs. Lentement, Chenoa recule d'un pas, cessant d'imposer sa présence alors que ses yeux sombres restent darder sur son comparse. Elle le fixe, le jauge, tente de comprendre sa façon d'agir mais elle a beau essayer, elle ne le comprend pas.
Est-ce que vous avez pu parler à votre Ho'yaneh ?
« Oui. »Pa.. pardonnez mon impolitesse ! Je ne vous ai même pas saluée, Chenoa. Comment dit-on dans votre langue ?
L'indienne esquisse un léger sourire en détournant le regard pour fixer à nouveau le cheval et le corps emmailloté du père d'Isaac. Elle hésite puis finalement le fixe à nouveau, soufflant au vent, le salut que le sang-mêlé désire entendre.
« Sekoh. »La jeune femme incline doucement la tête en signe de respect, une révérence extrêmement simple mais qui montre que pour elle, il n'est pas simplement un étranger, par juste un demi-sang.
« Chenoa a parlé avec Ho 'yaneh... Puisque Isaac a donné son soutient à Wakiza et Chenoa au péril de sa vie, Ho'yaneh a donner son accord pour que Isaac donne son papa à la terre indienne et rejoigne l'esprit de sa maman. »Chenoa se détourne lentement de son comparse, s'approchant du cheval et dénoue sa bride pour le tirer doucement. Elle ouvrira la voie car elle sait où les morts sont enterrés. Après tout, combien d'entre eux a-t-elle mit elle-même en terre? Ses fonctions ne sont pas toujours aisées, surtout pour quelqu'un de son âge. Enterrer le corps est facile, préparer les funérailles aussi, tout comme souffler des prières. Ce qui ne l'est pas, c'est la tristesse des familles, c'est affronter leur regard, leurs pleurs et leur douleur. Ce qui est difficile c'est d'être là pour eux sans prendre parti.
« Suis-moi Isaac, moi montrer ou toi enterrer ton papa. »Toujours si peu bavarde, l'Indienne se met en marche, observant l'étendue du village alors qu'elle s'en éloigne, la monture de son ami sur les talons. Il faut quelques minutes à peine pour rejoindre l'espace dédier aux morts et c'est là, sous l'ombre des arbres que son entreposé les carcasse mis dans des trous et recouvert ensuite. Ce que la terre donne, elle le récupère toujours. Chenoa désigne un trou dans le sol, prêt à recevoir le cadavre dont l'odeur commençait sérieusement à indisposer l'Indienne. Elle tend le bras, désigne la tombe vide et pose sur Isaac un regard paisible.
« Amis de Chenoa avaient creusé trou à sa demande. Trou pour papa d'Isaac... »Alors qu'elle se rapproche de lui, la jeune femme continue de dévisager son comparse, avec toujours plus de curiosité dans le regard. Il lui ressemble tellement et se montre pourtant si différent. C'est presque aberration mais Chenoa ne s'en offusque pas.
« Pourquoi Isaac n'a pas l'air triste? »